Retour sur le colloque « Ressource en bois énergie dans les Hauts-de-France : où en est-on ? »

Retour sur le colloque « Ressource en bois énergie dans les Hauts-de-France : où en est-on ? »

Le 6 décembre 2022 à Artois Expo, s’est tenu le colloque sur la ressource en bois énergie en Hauts-de-France, avec près de 50 participants. Voici le compte-rendu des échanges. 

LE BOIS ENERGIE, PREMIERE ENR THERMIQUE EN HAUTS-DE-FRANCE : LES ENJEUX DE LA FILIERE

Intervention de Christophe ROGER, responsable Filières biomasse – réseaux de chaleur – EnR électriques pour l’ADEME Hauts-de-France 

ETAT DES LIEUX LA RESSOURCE FORESTIERE EN HAUTS-DE-FRANCE

Intervention de Guillaume RIELLAND, directeur adjoint du CNPF Hauts-de-France Normandie (Centre National de la Propriété Forestière)

L’autoconsommation reste très difficile à évaluer. Baisse en bois bûche due à hausse du granulé (cf. plus bas), plus facile en consommation mais plus difficile à exploiter pour le propriétaire forestier.
Il devient de plus en plus compliqué de trouver des prestataires pour du bois bûche sur pied, diminution des affouagistes. On en trouve encore près des grandes villes. Même constat en forêts domaniales, même désaffection mais effet récent d’aubaine avec la crise énergétique.

LA TENSION SUR LA RESSOURCE FORESTIERE EN BOIS ENERGIE

Table ronde avec des gestionnaires forestiers :

  • Guillaume COUSSEAU, directeur de la COFORAISNE
  • Pierre DUCRAY, directeur de Nord Seine Forêt Aménagement, Approvisionnement (NSF2A) et de Sylvowatts
  • Eric MARQUETTE, directeur d’agence territoriale Nord et Pas-de-Calais pour l’Office National des Forêts (ONF)

Il existe de la disponibilité de ressource en forêt privée (inférieures à 25 ha), insuffisamment exploitée et en surcapitalisation ; aujourd’hui nécessaire d’y travailler car retard. Difficiles à mobiliser : souvent sans documents de gestion durable et avec accès compliqué. Nécessaire travail de fond : mobilisation, cloisonnement, renouvellement, accessibilité. C’est un travail à mener, paramétré par les gestionnaires, un enjeu sylvicole qui s’inscrit dans le temps, quelques années à prévoir.

Transfert entre les différents types de bois énergie : la diminution des affouagistes fait aller vers des unités plus professionnelles, ce qui peut à terme créer une concurrence avec le bois d’œuvre.

Les forêts domaniales représentent environ 130 000 ha en Hauts-de-France. Toutes ont des documents de gestion, avec un niveau élevé de prélèvement, souvent proche de l’accroissement annuel, parfois supérieur quand il est nécessaire de décapitaliser pour des raisons sylvicoles (changement climatique). 600 000 m3 de bois produits annuellement en forêt publiques en Hauts-de-France, 50% en bois énergie bois d’industrie.

La difficulté vient des à-coups de récolte : une crise sanitaire (comme le frêne) crée un afflux de matière. Avec toutefois des freins à la récolte : desserte, insatisfaction sociale.

Les volumes supplémentaires en forêts domaniales : frêne, scolytes. Aujourd’hui, la question principale est de connaître l’impact du changement climatique et des sécheresses successives (bois dépérissant) : interrogation sur la régularité de la ressource. Plutôt en baisse car fin de phase de décapitalisation, mais peut remonter soudainement si accident climatique.

En forêts privées : courbe descendante sur le frêne, encore quelques secteurs. Plutôt une substitution de volume qu’une augmentation nette, et moins massif que les scolytes ou les incendies. Beaucoup de frênes ont été coupés à la place des coupes de chêne qui étaient à faire : retard sur les chênaies.

Les gestionnaires forestiers sont toujours plus ou moins en gestion de crise : peu de visibilité pour le sylviculteur, ce qui peut poser un problème de planification, alors que demande des maîtres d’ouvrage pour leurs plans d’appro.

Enjeu principal de cette mobilisation de ressource : équipement et main d’œuvre, pour mobiliser les volumes. Nécessaire d’améliorer le rendement des équipements mais aussi de pallier le manque de main d’œuvre. C’est donc aussi un enjeu de fonds publics. La loi sur les EnR ne mentionne que l’électricité, solaire et éolien : la chaleur est importante également.

Oui, aujourd’hui, il y a de quoi développer des projets bois énergie. Il est essentiel d’avoir les plans d’approvisionnement très en amont, ne pas se tromper dès le début des projets. Avec acteurs qui s’engagent : s’ils signent, ils tiennent.

Table ronde avec des producteurs de bois énergie :

  • Denis DELESTREZ, dirigeant de l’entreprise Delestrez
  • Julien JOLY, responsable bois énergie pour l’entreprise Sylvabois

Entreprise Delestrez, 130 salariés, 20 M€ de chiffre d’affaires, 35% sur le bois énergie. S’attendait à des tensions fortes, or ce n’est pas le cas : les panneautiers ont réduit leurs achats, année sèche favorable à la sortie des bois, stock croissant en bord de route, provision de stock des gros faiseurs.

Sylvabois travaille à 70% en forêts privées. Saison passée tendue, celle en cours plus sereine car saison sèche et saison de chauffe qui a démarré plus tard. Forêts privées (quand inférieures à 20 ha) souvent mal desservies, peu de places de dépôt ; compliqué mais réel potentiel. Effet boule de neige : coût supplémentaire d’accès, à déduire du prix d’achat, ce qui devient compliqué pour les propriétaires forestiers.

Hausse du prix de l’exploitation forestière : carburant, séchoirs… Du mal à rémunérer le propriétaire forestier, réel problème de marge : pour pouvoir acheter la ressource, il faut pourvoir vendre au bon prix. Vigilance sur cette marge, pour avoir les moyens de bien gérer ses ressources humaines. En effet, l’emploi est le cœur de l’entreprise, mais aussi son goulot d’étranglement. Nécessaire travail sur la fierté du métier : rendre visible les opérations. Également réel problème d’acceptabilité des travaux forestiers : être collectivement fier de cette ressource forestière.

Pas de concurrence entre plaquettes forestières et bois bûche, deux marchés complètement différents. La mécanisation se développe sur bois bûche et va sélectionner du bois d’œuvre de qualité variée (billons droits).

Risque réel sur les contrôles en cours de l’OFB : risque d’interdiction de la récolte des bois de mars à juillet. Echanges en cours au niveau national sur cette interprétation de la réglementation.

 

LA TENSION SUR LE GRANULE DE BOIS VUE PAR LA FILIERE NATIONALE

Intervention de Eric VIAL, délégué général de l’association Propellet

Consommation en France de 2,4 M de tonnes, production de 1,8 M de tonnes. Production insuffisante à partir de 2017 : plusieurs producteurs ont renoncé à produire par manque de rentabilité, prix resté trop bas. Gros changement de comportement d’achat en 2022, avec une demande complètement décorrélée du besoin dès février mars, avec 6 mois d’avance, mais aussi en volume. Marché 2022 des ventes d’appareils à granulés : +13 ou 14%. La fourniture de granulés correspond aux besoins mais demande anormalement haute.

Interdépendance forte avec les scieurs (sciure) : en ralentissement, construction bois commence à ralentir, déjà baisse de production des scieurs. Prix à l’étranger supérieurs, ce qui a entrainé une hausse des prix des matières importées. Prix du granulé multiplié par 2 entre janvier et juin.

Il y a donc eu une bulle de demande, qui s’est dégonflée. La production augmente fortement cette année, avec des usines qui ont commencé leurs travaux en 2019 et se mettent à produire en 2022. La production sera multipliée par deux d’ici 2028.

Depuis quelques semaines, baisse constatée des ventes d’appareils à granulés, pour augmentation des ventes de poêles à bûche. Deux usages différents. Le bois bûche n’est pas en déclin : +26% de vente d’appareils à bûches entre 2021 et 2020.

Le granulé feuillu fonctionne, tellement densifié que répond aux mêmes normes que résineux.

Granulé et plaquettes forestières ne sont pas concurrents, contexte différent (Cf. étude Ademe). Si forte intermittence : favorable au granulé, plus vite démarré-arrêté. En logistique, le granulé est plus dense, moins de camions, moins de stockage.

Installer de nouvelles unités de production : attention, la production de granulé ne dégage pas de marge, pas de négociation de prix à prévoir. Monter une usine de granulation n’est pas simple : quels bois à récupérer dans les feuillus, après quelle autre activité, nécessité d’avoir des connexes. Lien fort avec l’activité bois d’œuvre.

 

PERSPECTIVES DE MOBILISATION SUPPLEMENTAIRE DE LA RESSOURCE

Interventions de François-Xavier VALENGIN, ingénieur responsable communication / vulgarisation pour le CRPF (Centre Régional de la Propriété Forestière) sur la mobilisation supplémentaire en forêt.

Aperçu de la ressource bocagère en Hauts-de-France, avec les interventions de :

Enjeu des plaquettes bocagères : entretien des haies. Sans revenu, pas d’entretien. L’enjeu est de passer de l’exploitation pour soi à la vente de combustible : norme, fines, humidité. Dans l’Avesnois, 350 km de haies exploitées, sur 10 500 km de haies en tout.

 

Exemple de valorisation de connexes de scierie, avec Julien JOLY, responsable bois énergie pour l’entreprise Sylvabois
Connexes valorisés en local. 2 camions par mois partent de la scierie : pas assez pour faire de la quantité. Les gisements en scierie semblent déjà placés en bois énergie.

 

Perspectives de développement des biomasses agricoles complémentaires au bois énergie, avec Thomas LEVEAUX, conseiller en énergie à la Chambre d’Agriculture du Nord-Pas-de-Calais > téléchargez la présentation ici
1100 ha de miscanthus en 2021 en Hauts-de-France, presque tout en Picardie. Lin très sujet aux aléas climatiques. 94% des anas de lin partent sur le panneau de particule, 5% en chaufferie. Présence de TCR (taillis en courte rotation) en Picardie.

Autres ligneux : la demande n’est pas suffisamment forte actuellement pour que des industriels investissent, se structurent et contribuent à des plans d’appro.

Boisements urbains et bois SSD : possibles gisements. Etude en cours à l’Ademe sur les déchets bois.

Si vous souhaitez en savoir plus sur le sujet, n’hésitez pas à contacter Leigh MITCHELL, chargé de mission bois énergie chez Fibois Hauts-de-France.